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Article technique

La séparation des jus de blancs et de rosés au cours du pressurage permet une vinification adaptée des fractions pauvres et riches en polyphénols afin de prévenir les risques d’oxydation prématurée des vins.

La conductivité est utilisée depuis la fin des années 90 pour le suivi en ligne de l’extraction (J-L. Favarel, Protection de la vendange et extraction des jus en vendange blanc, colloque Cinquantenaire ITV France, 1998). Cette technologie robuste permet de placer un capteur en ligne mais ne mesure pas directement les polyphénols. L’augmentation de signal est liée à l’extraction des ions K+ de la pellicule du raisin. L’augmentation de la conductivité au cours d’un pressurage indique que les montées de pression progressives engendrent l’extraction de composés de pellicule. Or dans la pellicule se trouve majoritairement les tannins des raisins blancs, d’où une présomption de l’extraction de ces derniers lorsque la conductivité augmente.

Le suivi pH-métrique donne une information similaire à celui par conductivité. La pH-métrie pose un problème de robustesse de sonde : elle est difficilement praticable en ligne.

Dans ces 2 cas, aucune mesure directe des polyphénols n’est réalisée. pH-métrie et conductimétrie ne permettent donc pas d’évaluer la teneur en polyphénols des jus. Ce sont des indicateurs du moment potentiel où les polyphénols peuvent avoir une concentration plus élevée.

Au contraire, la mesure voltamétrique par le PolyScan donne une évaluation directe de cette teneur en polyphénols, qui est influencée par l’extraction des composés de la pellicule mais aussi par l’oxydation des polyphénols.

Dans certains cas, la prise de décision par le biais de suivi par conductivité ou par voltamétrie est similaire quant au moment de séparation des jus, comme expliqué dans l’exemple 1 ci-dessous. Dans d’autres cas, il peut exister une différence, notamment liée à l’oxydation plus ou moins importante des polyphénols en cours de pressurage, comme dans l’exemple 2.

Enfin, la mesure par voltamétrie permet d’évaluer la teneur en polyphénols et donc d’adapter le process œnologique, ce que les mesures de pH et conductivité ne permettent pas.

Exemple 1 : Pressurage de Chardonnay

Le pressurage suivant a été suivi par conductimétrie, pH-métrie et voltamétrie.

Tout d’abord, les augmentations de conductivité, de pH et de PhenOx (indice obtenu par voltamétrie et représentant les polyphénols totaux) sont observées au cours du pressurage. Pour des raisons de lisibilité, l’évolution du pH n’a pas été rapportée sur la figure 1 mais la figure 2 montre que pH et conductivité sont linéairement corrélés.

La séparation des jus est réalisée traditionnellement après la 1ère séquence à 1600 mbars. A ce moment-là, plus de 90 % des jus ont été extraits. Cependant, que ce soit en considérant le pH, la conductivité ou le niveau de PhenOx, il est évident à ce moment-là que des jus de qualité différentes en termes de composition phénolique ont été mélangés. Les 3 indicateurs montrent une augmentation significative de leurs valeurs. En considérant
l’augmentation de conductivité, une séparation aux alentours de la séquence 11 (800 mbars) serait préconisée, après une augmentation de conductivité de 20 % environ. Avec le niveau de PhenOx la séparation semble optimale aux alentours de la séquence 10 (600 mbars), après une augmentation de 80 à 100 unités de PhenOx suivant un plateau aux alentours de 700. Le niveau atteint à ce moment-là du pressurage est de plus supérieur à la valeur médiane observée sur jus de chardonnay au pressurage (700). Dans les 2 cas, la séparation à ce moment-là du
pressurage permet d’obtenir plus de 80 % du volume des jus extraits et de préserver un niveau de polyphénols relativement faible dans les jus de 1ère qualité.

On observe en fin de pressurage sur un échantillon une valeur de PhenOx qui stagne alors que la conductivité augmente : ceci est le reflet de l’oxydation qui a lieu en fin de pressurage, entrainant une quantité de polyphénols plus faible alors que la concentration en K+ continue d’augmenter (point en dessous de la corrélation sur la figure 3).

Figure 1 : pressoir de Chardonnay. Evolution de la conductivité et du niveau de PhenOx au cours du pressurage.
Figure 2 : corrélation entre pH et conductivité des échantillons prélevés au cours du pressurage
Figure 3 : corrélation entre niveau de PhenOx et conductivité des échantillons prélevés au cours du pressurage. La corrélation a ici été calculée en omettant le point de plus forte conductivité pour lequel un niveau de PhenOx plus faible est observé du fait de l’oxydation en fin de pressurage.

Dans cet exemple, la prise de décision sur la conductivité ou sur le niveau de PhenOx obtenu par voltamétrie permet de prendre des décisions proches et de préconiser une séparation de jus plus précoce que celle réalisée traditionnellement pour éviter le mélange de jus de forte concentration en polyphénols avec des jus de plus faible concentration.

Exemple 2 : Pressurage de Chardonnay

En revanche, sur le 2ème exemple de pressoir de Chardonnay, une augmentation de la conductivité est observée au cours du pressurage comme pour l’exemple précédent. En revanche, le suivi par voltamétrie, montre ici une phase de pressurage qui présente une augmentation très forte de la teneur en polyphénols, liée à une extraction plus forte et une oxydation moindre dans cette phase de pressurage. La fin de pressurage est ensuite plus oxydative et provoque une baisse de PhenOx. Le suivi par voltamétrie permet ici une analyse plus fine que le suivi par conductivité, donnant accès au niveau réel de polyphénol dans les jus qui résulte à la fois de l’extraction et de l’oxydation simultanée. Cet effet est lié ici à la réalisation de rebêches dans le pressoir à ce moment de pressurage qui engendre une forte augmentation du débit des jus (figure 5) et une oxydation moins forte.

La décision de fractionnement optimale d’après les données voltamétriques devrait être réalisée à 1600 mbars, dès qu’une augmentation de 100 unités est observée. Les mesures suivantes permettent de confirmer une forte concentration sur la cuve de jus de presse et donc de prévoir de mettre en place une stratégie de traitement des jus permettant de faire baisser la charge phénolique (collage ou oxygénation).

Figure 4 : pressoir de Chardonnay. Evolution de la conductivité et du niveau de PhenOx au cours du pressurage
Figure 5 : volume extrait au cours du pressurage

En conclusion, la méthode voltamétrique permet une analyse rapide et précise des quantités de polyphénols extraits lors du pressurage. La voltamétrie peut à minima donner les mêmes résultats que la conductimétrie. Mais cette technique permet aussi un suivi plus fin car elle permet d’appréhender les phénomènes d’oxydation pouvant avoir lieu durant le process. Les données obtenues par voltamétrie permettent d’affiner les séparations des presses et permettent d’envisager les traitements de ces dernières avant réassemblage avec les jus de première qualité.

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12 Jan 2023