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Article technique

Dominé pendant de nombreuses années par les bouchons de liège, le marché des bouchons pour vins tranquilles a complètement changé et se partage maintenant entre cinq grandes catégories de technologie de bouchage pour bouteilles.

Le schéma ci-dessous (figure 1), basé sur les données marché recueillies par les équipes de business intelligence de Vinventions, permet de se rendre compte que, malgré les idées reçues, la solution de bouchage qui domine n’est autre que la capsule à vis avec près de 37 % de part de marché. De plus, autre résultat pouvant surprendre, les bouchons en liège mono-pièces ne représentent qu’environ 10 % de ce marché. Les bouchons techniques à base de liège représentent quant à eux 20 % de ce marché et se font rattraper par les bouchons micro-agglomérés à base de particules de liège de petites tailles, agglomérées dans des matrices le plus souvent composées de polyuréthane, avec 16 % de part de marché. Enfin, la catégorie des bouchons synthétiques et des bouchons PlantcorcTM bio-sourcés représentent 15 % de marché.

Cette diversification de solution de bouchage s’est opérée de façon assez rapide car à la fin des années 90, les bouchons à base de liège représentaient 97 % du marché selon nos données. Les deux facteurs ayant soutenu cette diversification sont sans aucun doute la recherche, par l’ensemble des intervenants de la chaîne de commercialisation de vins, de solutions sans goût de bouchon et permettant une homogénéité accrue entre les bouteilles.

Figure 1 : Répartition des différentes solutions de bouchage pour vin tranquille au niveau mondial en 2017 (source Vinventions)

1. Les critères actuels de sélection des obturateurs pour vins tranquilles

Longtemps considérés comme un simple mode d’obturation des bouteilles, les bouchons pour vins tranquilles doivent à présent remplir un grand nombre de critères afin de satisfaire aux exigences des producteurs, des distributeurs mais également des consommateurs. Sans présumer de leur importance relative, les critères suivants doivent être considérés par les utilisateurs pour se donner les plus grandes chances de garantir des vins sans défaut, conservés dans les meilleures conditions avant d’être dégustés et avec un succès durable sur le marché.

  • Les bouchons doivent être dépourvus d’haloanisoles (TCA, TeCA, PCA, TBA…) afin d’éviter les goûts de bouchon et les goûts de moisi. Pour rappel, les haloanisoles au-dessus de leur seuil de reconnaissance donnent des défauts de type goût de bouchon. Mais à des concentrations comprises entre seuil de perception et seuil de reconnaissance, ces molécules dénaturent les caractéristiques des vins en masquant les arômes d’intérêt de ces vins (Takeuchi et al., 2013). Bien que de nombreuses techniques aient été développées, leurs efficacités ne sont pas toutes équivalentes et les utilisateurs doivent rester vigilants par rapport à ces effets de masquage de l’arôme qui sont responsables de variations bouteille à bouteille. Ce sujet n’est donc malheureusement pas clos.
  • L’aptitude au contact alimentaire dans des liquides contenant de l’alcool est un autre élément à demander à son fournisseur. A part les bouchons en liège mono-pièces qui échappent à toute régulation sérieuse du fait d’un certain empirisme ambiant, toute autre solution de bouchage doit faire l’objet d’une étude de contact alimentaire auprès de laboratoires spécialisés. Il est important de ne pas oublier que la neutralité organoleptique (pas d’impact du bouchon sur la couleur, l’arôme et les propriétés gustatives du vin) est un gage de qualité.
  • Les performances mécaniques des bouchons sont primordiales pour préserver les vins de façon optimale. En effet les performances lors de l’embouteillage et pendant le stockage des bouteilles permettent de garantir l’absence de fuites de gaz (oxygène et gaz carbonique) ainsi que de liquide (bouteilles couleuses). Pour les bouchons cylindriques, il est primordial de bien connaître les propriétés mécaniques et notamment l’ensemble des grandeurs physiques qui permettent de bien appréhender le retour élastique. Pour les capsules à vis, il serait imprudent de penser que les risques de fuites de gaz ou de liquide sont inexistants et il faut vraiment garder à l’esprit que l’étanchéité ne se fait que par l’intermédiaire des joints des capsules à vis. Au vu de la faible surface de contact mise en œuvre pour assurer cette étanchéité, on comprend mieux l’influence cruciale des réglages fins lors des mises en bouteille à chaque changement de capsules ou de format de bouteilles.
  • Quand les propriétés mécaniques des bouchons sont optimales, alors il faut considérer les aptitudes au vieillissement des vins pour les différentes technologies considérées. Lorsque les fuites sont impossibles, les matériaux utilisés pour les différents types de bouchons doivent permettre de réguler les échanges gazeux (entrée d’oxygène et perte de gaz carbonique). Cette thématique des échanges gazeux sera le principal objet de discussion de cet article.
  • Les solutions de bouchage sont également au cœur des considérations de développement durable et il est important de pouvoir demander à son fournisseur des éléments attestant de son implication dans ces sujets tant au niveau de son outil de production que des propriétés environnementales intrinsèques des bouchons. La législation ainsi que les engagements volontaires de la grande distribution et des producteurs de vins vont engendrer le besoin de documents pouvant attester de l’empreinte carbone, du cycle de vie, de la part de matières bio-sourcées, du niveau de recyclabilité, de la biodégradabilité, etc… des solutions de bouchage diverses.
  • Enfin la composante marketing peut aussi guider la sélection de tel ou tel type de bouchage. La perception consommateur reste un élément souvent avancé comme clé de décision mais il n’existe que peu d’études sérieusement menées, sans biais cognitif ni parti pris dans les questions posées aux consommateurs, pouvant étayer ces assertions. La perception consommateur ainsi que la rapidité d’adoption de nouvelles solutions de bouchage varient de pays en pays. L’adoption rapide de la capsule à vis en Australie ou en Scandinavie en est un exemple. L’esthétique et l’originalité peuvent également représenter des critères de sélection mais il faut veiller cependant à ne pas compromettre la qualité des vins pour autant.

2. Gestion de l’oxygène et bouchons

2.1. Les mesures d’oxygène à travers les bouchons

Cette thématique est assez récente et il est intéressant de rappeler que l’étude qui est considérée comme la première montrant des perméabilités différentes entre types de bouchons, datant de 2001 (Godden et al., 2001), n’avait en fait qu’émis l’hypothèse de perméabilités différentes entre les bouchons étudiés. En effet, du fait de l’absence de technologie de mesure d’oxygène précise et facile à mettre en œuvre sur un grand nombre d’essais simultanément, les auteurs n’avaient pas pu démontrer leurs hypothèses.

La méthode de référence à l’époque était une méthode utilisant la technologie Mocon (Peck et al., 2005) selon un protocole qui avait été adapté de la norme ASTM F1307-02 (cf. bibliographie) permettant de mesurer les perméabilités de films. Cette méthode, jamais réellement validée pour la mesure des perméabilités des bouchons, est toujours en service dans des laboratoires d’analyses de matériaux mais présente les désavantages d’être onéreuse, de ne pouvoir traiter qu’un nombre de tests limités et de nécessiter de couper les goulots de bouteilles avant de les coller sur une plaque métallique, ce qui ne permet pas de garantir l’absence de fuites dans le système (voir photo 1).

Photo 1: Dispositif de mesure de perméabilité de bouchon selon la méthode Mocon

Plusieurs méthodes ont alors été développées par différentes équipes. Basées sur différents principes de mesure, elles sont soit restées la propriété d’industriels (Rabiot et al., 1999) soit elles n’ont pas franchi le cap de la méthode expérimentale académique et n’ont pas été transposées en méthode de routine pour mesurer la perméabilité des bouchons (Lopes et al., 2007).

2.2. la méthode NomaSense de Wine Quality Solutions

Notre équipe a débuté ses travaux sur le développement d’une méthode de mesure de la perméabilité des bouchons en 2007. Une technologie non-invasive, basée sur la luminescence utilisant des capteurs pouvant se coller à l’intérieur de bouteilles transparentes, la technologie NomaSense (Wine Quality Solutions), a été choisie. Cette technologie de mesure de l’oxygène a été validée selon les recommandations de l’OIV (Dieval et al., 2009).
Nous avons également publié la validation de la mesure de la perméabilité des bouchons avec la méthode NomaSense en comparaison avec la méthode Mocon « dite de référence » (Dieval et al., 2011). L’objectif était de développer une méthode rapide, abordable et précise. Cette méthode est devenue petit à petit la méthode de référence comme en atteste son adoption par de gros groupes bouchonniers (Oliveira et al., 2013 ; Chevalier et al., 2019).

2.3. le protocole de la méthode NomaSense

La mise en œuvre de la méthode reste relativement simple mais requiert tout de même beaucoup de soin au vu des conditions d’inertage préalable à la mesure. Nous avons choisi de travailler avec une méthode de mesure en l’absence de vin car ce dernier réagit avec l’oxygène et induit une baisse de la quantité d’oxygène présente dans la bouteille.

  • Matériel : Des bouteilles en verre transparent de 375 mL sont utilisées. Leurs profils internes de col sont contrôlés par un palpeur automatique (Egitron® PerfiLab®) pour s’assurer que les dimensions soient dans les spécifications et pour calculer le volume exact occupé par le bouchon.
    Des capteurs PSt6 de Wine Quality Solutions sont collés à l’intérieur de ces bouteilles pour permettre une mesure non-invasive au cours du temps. Ces capteurs sont calibrés en usine.
  • Bouchage : Le bouchage des bouteilles reste le point critique de cette méthode. Il est très important de réaliser le bouchage après un inertage très efficace de la bouteille afin de démarrer les mesures avec une atmosphère dans la bouteille à moins de 0,5 hPa d’oxygène. Pour cela, une ligne d’embouteillage GAI (modèle MLE 441) est utilisée, dont la boucheuse a un diamètre de compression réglé à 15,7 mm. Le double inertage à l’azote 5.0 Aligal 1 (>99.999%) des bouteilles est réalisé par le système vide/gaz des becs électropneumatiques. Le bouchage est fait sous vide à 0.95 bar, vitesse à 13 Hz.
  • Stockage des bouteilles : Toutes les bouteilles sont stockées dans une armoire thermostatée à 23 ± 1°C et 70 ± 5% d’humidité relative (voir photo 2). Les mesures sont réalisées pendant 14 jours à raison de 2 mesures par jour.
Photo 2 : Armoire thermostatée pour le stockage de bouteilles servant à la mesure de la perméabilité de différents types d’obturateurs. La mesure de l’oxygène pénétrant à l’intérieur de la bouteille est réalisée avec l’analyseur NomaSense O2 P6000 et l’utilisation des capteurs d’oxygène PSt6.
  • Mesure à l’aide du NomaSense O2 P6000
    Le NomaSense O2 P6000 est utilisé pour mesurer la teneur en oxygène dans les bouteilles. La fibre optique est appliquée sur le verre à l’extérieur de la bouteille en direction des capteurs PSt6 collés à l’intérieur comme représenté sur la photo 2. L’analyseur émet une lumière bleue qui excite le luminophore contenu dans le capteur. La quantité d’oxygène présente sur le capteur est proportionnelle au retard de l’émission de la lumière rouge générée par le retour au niveau électronique de base du luminophore. Ce principe simple de physique est le plus spécifique de la mesure de l’oxygène parmi les technologies de mesure connue à ce jour.
  • Traitement des données et modélisation
    Toutes les mesures effectuées sont stockées puis traitées en utilisant le logiciel XLfit (IDBS, Guildford, Surrey, UK) qui est une option de modélisation de Microsoft® Excel®. La partie la plus compliquée du développement de cette méthode était d’en faire une méthode rapide. Pour cela, notre équipe a développé un modèle prédictif permettant de bien caractériser les propriétés de perméabilité des bouchons en 14 jours. Le modèle développé se base sur les lois de Fick et de Henry ainsi que sur les équations de diffusion de Crank. L’approche et les hypothèses de travail sont détaillées dans notre papier de 2011 (Dieval et al., 2011). Ce papier montre également la bonne corrélation entre les résultats prédits au bout de 14 jours et ceux obtenus par la méthode Mocon.

2.4. Définitions et éléments de perméabilité

Prenons le temps de rappeler certains points et de fixer quelques définitions importantes dans le but d’éviter des confusions qui ont pu naître du fait d’un manque d’homogénéité de communication dans le domaine de la perméabilité des bouchons.

La méthode NomaSense que nous avons développée, ainsi que l’approche suivie, nous ont permis d’être les premiers à considérer dans leur globalité les aspects liés aux apports d’oxygène au travers des bouchons. Dans les conditions expérimentales décrites ci-dessus, la courbe classique obtenue d’apport d’oxygène d’un bouchon est représentée sur la figure 2 ci-dessous. Cette courbe, qui suit le modèle développé sur la base de l’équation de Crank, permet de distinguer 2 phases distinctes mais cependant interconnectées par l’équation de Crank :

  • la phase de désorption (oxygène contenu dans le bouchon et libéré dans la bouteille après le bouchage)
  • la phase atteinte à l’équilibre appelée communément OTR (pour Oxygen Transmission Rate, passage constant d’oxygène).
Figure 2 : Courbe de diffusion d’oxygène, représentant l’apport d’oxygène global d’un obturateur, qui suit 2 phases distinctes. Une première phase de désorption au début (oxygène comprimé dans le bouchon et libéré dans la bouteille), suivi d’une phase d’équilibre communément nommée OTR (phase de transfert constant de l’oxygène à travers le bouchon).

Les 2 phases observées peuvent s’expliquer (cf. figure 3) en rappelant que la force favorisant l’entrée d’oxygène d’un compartiment vers un autre est la différence de pression partielle en oxygène existant entre ces 2 compartiments. Un bouchon cylindrique est un cylindre poreux qui contient donc de l’air bouchons et l’insertion dans un goulot (prenons comme dimension référence 18,5 mm de diamètre interne) la pression en oxygène dans le cylindre passe de 21 à plus de 30 %. Malgré une sortie de l’oxygène vers l’extérieur de la bouteille, l’oxygène aura tendance à entrer dans la bouteille rapidement après le bouchage car la distance à parcourir et le gradient de pression est plus favorable que lorsque l’équilibre est atteint (lorsque la suppression dans le bouchon comprimé a disparu).

Figure 3 : Schéma expliquant les phénomènes de désorption et de taux de transfert d’oxygène d’un bouchon cylindrique avec une concentration en oxygène proche de 21 % dans son état initial.

Même si ces phénomènes avaient déjà été observés, nous avons été les premiers à les décrire mathématiquement et à corréler le rôle de la désorption avec les premières phases de l’évolution du vin. Ce travail mené en collaboration avec l’AWRI a été publié en 2011 (Ugliano et al., 2011) et a été à l’origine de la création du premier bouchon cylindrique traité contre la désorption, appelé aujourd’hui le Nomacorc Select Green 100, et commercialisé en 2011. Depuis, le bouchon Nomacorc Reserva bénéficie de ce même traitement breveté. Ces deux bouchons restent à notre connaissance les seuls possédant ces caractéristiques de gestion d’oxygène avancées. L’avantage d’éliminer la désorption réside dans le fait que les arômes sensibles à l’oxygène sont mieux préservés. De plus, contrairement à des solutions de bouchage avec des OTRs très faibles, les apports d’oxygènes plus importants par la suite permettent de lutter contre les phénomènes de réduction pouvant apparaître au cours du vieillissement des vins (Ugliano et al., 2011 & 2012).

Il est bon de préciser 2 points importants quant à la désorption. Premièrement l’oxygène n’est pas chassé dans la bouteille de façon brutale (en termes plus triviaux il n’y a pas de « pscchttt » d’oxygène vers la bouteille). Les matériaux utilisés selon le type de bouchons possèdent des caractéristiques de diffusibilité intrinsèque à l’oxygène qui vont définir les vitesses de progression de l’oxygène. Deuxièmement, en fonction de l’épaisseur des matériaux et de l’organisation cellulaire ou moléculaire de ces matériaux, les vitesses de diffusion apparentes peuvent varier grandement. En d’autres termes plus imagés, l’oxygène doit se frayer un chemin au travers de couches successives de matériau avant de pouvoir être libéré dans la bouteille. Comme nous l’avons déjà dit, désorption et OTR sont liés par l’équation de Crank. Ainsi, plus l’OTR d’un bouchon sera faible plus la désorption durera longtemps. A titre d’exemple, nous avons évalué le temps qu’il faut pour que la phase de désorption soit révolue pour différents bouchons de la gamme Nomacorc Plantcorc (cf. tableau 1). Bien qu’une publication récente propose de fixer la désorption au bout de 6 mois (Chevalier et al., 2019), il ne nous semble pas opportun de fixer de durée pour la désorption a priori au vu des résultats du tableau ci-dessous.

Tableau 1 : Durées de la phase de désorption selon les OTR des bouchons

De plus rappelons que toute fuite à l’interface verre/bouchon contrarie les courbes obtenues et le modèle ne peut plus être utilisé. La photo 3 ci-dessous illustre les différentes sources d’oxygène pouvant entrer dans une bouteille de vin au niveau du bouchon cylindrique. En l’absence de fuite, les apports d’oxygène des bouchons sont donc la somme de la désorption et de l’OTR.

Photo 3 : Illustration des différentes sources possibles d’apport d’oxygène des bouchons cylindriques : fuites, OTR, désorption.

2.5. Les unités utilisées

S’il est bien un point qui a pu créer de la confusion sur le marché, c’est bien celui des unités utilisées par les uns et les autres.

Initialement les unités pour définir les OTRs étaient issus de la norme ASTM et s’exprimaient en cc/jour/bouchon à 100 % d’oxygène (ce qui veut dire que les bouchons étaient exposés à une atmosphère de 100 % d’oxygène au lieu de 21 %, concentration dans l’air). Le premier niveau de confusion est apparu lorsque des unités en cc/jour/bouchon à 21% d’oxygène ont vu le jour. Certains ont profité de ce facteur 5 de différence pour avancer des valeurs plus faibles d’OTR. Puis, de nouvelles unités plus compliquées ont vu le jour.

Nous avons proposé il y a une dizaine d’années de simplifier tout cela et d’utiliser une unité simple et comprise de tous les vinificateurs à savoir le mg/bouteille. En effet, les techniciens de la filière œnologique sont habitués à doser des apports d’oxygène lors de la vinification de l’ordre du mg par mois et sont coutumiers de concentrations en molécules importantes du vin en mg/L, comme c’est le cas pour le SO2 libre. Nous avons investi beaucoup de temps à mieux comprendre le lien entre apports d’oxygène au travers des bouchons et évolution des vins en bouteille et il nous était donc apparu évident que l’on devait utiliser des unités comprises de tous et permettant d’établir des corrélations plus facilement. D’autres bouchonniers suivent désormais le pas, comme en attestent les publications récentes (Oliveira et al., 2013 ; Chevalier et al., 2019).

3. Apports d’oxygène et homogénéité

Comme déjà mentionné dans l’introduction de cette revue, les problèmes de variations de bouteille à bouteilles furent une des causes principales de la diversification des modes de bouchage pour les vins tranquilles. Ces variations peuvent être dues à des niveaux d’apport d’oxygène très variables d’un bouchon à l’autre (M. Ugliano et al, 2015). Encore une fois, pour mettre ces variations en évidence, il fallait pouvoir mesurer un grand nombre de modalités, ce qu’a permis la méthode NomaSense.

Depuis plus d’une dizaine d’années, nous avons relayé le message que déterminer les valeurs d’apports d’oxygène ne suffisait pas pour se donner les moyens de caractériser convenablement ses choix de bouchage mais qu’il fallait vraiment prendre en compte le coefficient de variation autour de la valeur moyenne. Nous avons ainsi pu analyser l’ensemble des solutions de bouchage existant sur le marché et pouvons en relater les principales observations. La figure 4 ci-dessous donne un aperçu des résultats obtenus pour différentes technologies de bouchage. Nous ne commenterons que les résultats sur les bouchons en liège, les micro-agglomérés et les bouchons co-extrudés (synthétiques et Plantcorc).

Figure 4 : Niveau moyen d’apport d’oxygène (trait horizontal rouge) et variabilité de cet apport (barre verticale grise) selon différent type de bouchons

La catégorie des bouchons en liège présente la plus grande variabilité entre bouchons parmi toutes les catégories que nous avons mesurées. D’ailleurs, l’étude publiée par les équipes d’Amorim en collaboration avec l’université de Bordeaux (Oliveira et al., 2013) a confirmé que la variabilité pouvant exister au sein d’une population de 600 bouchons de liège tubés dans 2 planches de liège seulement pouvait être très importante et varier de 0,5 à plus de 4 mg d’oxygène sur 1 an, comme illustré par les résultats du tableau 2.

Tableau 2 : Résultats d’une étude réalisée par Amorim et l’université de Bordeaux qui met en évidence l’importante variabilité de perméabilité au sein d’un lot de 600 bouchons de liège. 5 classes perméabilités différentes sont identifiées allant de 0.5 à plus de 4 mg d’oxygène par an.

Nous avons mesuré les mêmes niveaux de variabilité au sein de notre laboratoire, et ce, même dans le cas où les bouchons ont été sélectionnés au préalable sur la base de leur masse respective ne permettant pas de relier la perméabilité des bouchons en liège à leur densité.

En ce qui concerne la classe des micro-agglomérés, on observe sur un grand nombre de mesures que la médiane de la catégorie est de 0,5 mg par an, ce qui correspond à la valeur basse d’OTR mesurée sur les bouchons naturels. La variabilité peut être observée entre différents producteurs de micro-agglomérés mais également entre lots d’un même producteur, ce qui doit inciter à bien appréhender cette variabilité même pour cette classe de bouchons industriels.

Figure 5 : Mesures de perméabilité de bouchons micro-agglomérés de fabricants différents. La médiane (10 répétitions par modalité) de perméabilité est de 0,5 mg/L, et des variabilités existent au sein d’un même lot de bouchon et entre fabricants.

Pour l’autre grande catégorie de bouchons cylindriques, le procédé de co-extrusion, utilisé pour la fabrication des bouchons synthétiques et des Plantcorc, est un moyen de production continue qui permet d’obtenir le meilleur niveau d’homogénéité d’un bouchon à l’autre comme illustré par les résultats du graphique précédent. Ce mode de production confère donc la meilleure homogénéité de performance à la classe des bouchons co-extrudés.

Conclusion

De nombreux critères entrent désormais en compte dans la sélection d’une solution de bouchage pour vin tranquille et permettent de répondre à la fois aux exigences des producteurs mais aussi à celles des différents marchés. Parmi ces critères, la gestion de l’oxygène à travers l’obturateur devient un argument de plus en plus mis en avant par différents fabricants de bouchons. Après avoir développé des modèles mathématiques rendant compte de l’apport d’oxygène des bouchons cylindriques, nous voulons attirer l’attention sur les points suivants :

  • l’OTR ne suffit pas pour décrire les performances en gestion d’oxygène des bouchons cylindriques
  • le phénomène de désorption doit aussi être pris en compte pour rendre compte des apports d’oxygène par les bouchons
  • la désorption dure d’autant plus que l’OTR est faible
  • enfin l’absence de variabilité intrinsèque des bouchons sélectionnés est un élément clé pour garantir l’homogénéité bouteille à bouteille en phase avec les exigences du marché

Les recherches réalisées en collaboration avec des instituts académiques de la filière viticole au niveau mondial nous ont permis de mieux comprendre l’influence de l’oxygène sur l’évolution du vin en bouteille et de développer une gamme de bouchon (Green Line et Reserva) avec des caractéristiques de gestion d’oxygène encore unique sur le marché du bouchage en termes d’apport d’oxygène et d’homogénéité.

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